Le dictionnaire des
mots moches
 
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Faits de langue-23 14.12.2000

Voyage au pays des mots (4/4) : les vertus de la métaphore journalistique

Ah ! la politique... matière indigeste s’il en est. Comment égayer, lorsqu’on se veut journal de qualité (" Le Monde ", " Le Soir "), les colonnes réservées à cette discipline si altruiste, si noble et si aride à la fois ? Comment ajouter une discrète touche de couleur à l’austérité de ces hauts faits accomplis, dans un total désintéressement, par les hommes et - parité aidant - les femmes de la Cité ? Que faire pour tant soit peu approcher le commun de cet inaccessible Himalaya ? Donner dans la métaphore, voilà qui peut familiariser le citoyen-lecteur avec la beauté du geste politique, mais attention ! il faut que l’image soit à la hauteur du jeu des acteurs, à la mesure de leur rôle. Le journalisme politique, nous l’avons déjà souligné précédemment, est truffé (j’allais écrire " Truffaud ", ç’eût été trop facile) de références à l’art cinématographique. Ainsi, lorsqu’il s’agit de signaler que la nouvelle ministre de l’Emploi et de la Solidarité n’est guère à sa place (déjà que sa présence " en pointillé " aux débats parlementaires est peu appréciée), ne dites pas que sa nomination résulte d’un mauvais choix. Parlez d’une erreur de " casting ". Le vocabulaire des arts de la scène est, lui aussi, plein d’heureuses ressources - même si un peu de circonspection est de mise. En effet, si l’ " arlésienne " de l’agenda social s’est enfin matérialisée (fût-ce sous la forme d’une " chétive " charte des droits fondamentaux européens), évitez pour autant, côté spectacles théâtraux encore, de traiter les membres du " couple exécutif ", quand bien même leur attitude vous ferait bouger les zygomatiques, de " marchands de détente " ou pire : d’ " intermittents du rire ". Cela fait mauvais genre. La météo politique est-elle à l’orage, à la confrontation ? Essayez donc l’imagerie guerrière. La chute d’un ministre (dont l’ " oraison funèbre ", prononcée par l’un de ses " pairs ", doit être comprise comme un appel " à la raison et à la modération " adressé à la " magistrature ") entraînera-t-elle la " mise en examen " de l’un ou, drame, de plusieurs de ses ex-conseillers ? Parlez de victimes " collatérales ". De dégâts " collatéraux ". Clamez que le déchu, pour revenir, conduira son " opération Renard du désert ". L’équipe gouvernementale est-elle idéalement composée ? Le monde des sports vous offre sa triomphale terminologie. Encensez la " dream team " de Jospin. Louez Seguin, " super-mécano de la droite parisienne ". Qualifiez la réunion " du G7 " de " marathon ", de " triathlon ", non de " décathlon " de la " mondialisation ". Or lorsqu’elle n’est faite que de " coups bas " (ce qui est bien rare, dois-je avouer), lorsqu’elle s’avère " abracadabrantesque " (selon le désormais célèbre mot " du chef de l’Etat "), lorsque par malheur elle " croule de son socle ", la politique ne soutient plus la comparaison qu’avec l’univers des petits artisans. Un tel en a " assez " (ou " marre " !) de l’ " ingérable boutique verte ". Tel autre, " plombier " lassé de colmater les brèches dans la " tuyauterie communautaire " et qui, de surcroît, voit s’éloigner le " mirage " (ou l’ " eldorado ") des excédents budgétaires, s’en ira " cultiver son potager ", dénoncer le " hold-up idéologique ", déplorer l’ " éclipse de l’esprit entrepreneurial ". Y a un peu plus, j’vous l’mets ? Depuis que la corporation des bouchers a infiltré les " cénacles ", l’ensemble des " décideurs " est atteint par le goût pour la " politique carnassière ". A cela, vous me répondrez en " Monsieur propre " que " seul un secouement de cocotier " peut encore sauver " la holding France " (ou Belgique, c’est selon). Mais le " roulement de mécaniques " de ceux qui ne veulent pas encore remiser leurs " rêves de calife " impressionne " nombre d’observateurs " pourtant sceptiques à l’idée de voir les " caciques " reprendre la main. Manifestement, leurs ambitions, décrétées " vieilles lunes " par les " primo-arrivants de la classe politique ", ne sont pas encore tout à fait " rangées au placard ". Alors que cela fait un bail que leurs idées ne sont plus un " produit d’appel ". Mais que voulez-vous, les " méandres " de la " mémoire collective " finissent par effacer les mauvais souvenirs de " gabegie ", de " maladministration " et de " dysfonctionnement ". Allez, ça ira mieux jeudi prochain.